L’environnement de l’entreprise et l’organisation du travail ne cessent d’évoluer. Depuis quelques années, de nouvelles formes d’organisation du travail (NFOT) émergent dans l’entreprise, avec la montée en puissance du télétravail, du travail collaboratif et du virtuel, mais aussi des espaces de travail repensés. Encore plus dans le contexte de la crise sanitaire, alors que la COVID-19 a obligé les entreprises à faire évoluer leurs activités. Quels sont les risques de ces nouvelles formes de travail pour les collaborateurs ? Comment les protéger au mieux dans le cadre de ces nouvelles organisations de travail et quelles actions de prévention mettre en œuvre pour assurer leur sécurité ?
Quelles sont les nouvelles organisations du travail ?
Mieux comprendre les NFOT
Depuis les années 90, l’entreprise connaît une évolution de l’organisation du travail : après le taylorisme ou le fordisme, on parle désormais de Nouvelles Formes d’Organisation du Travail (NFOT). Elles sont portées par le développement des technologies de l’information et de la communication et placent la flexibilité au cœur de l’entreprise.
Il est autant question de la flexibilité des salariés, que celles des objectifs et des tâches. Et de changement de méthodes : la méthode Kanban par exemple, née notamment du toyotisme japonais, vise à une approche « Agile » et à la responsabilisation des collaborateurs.
Bon à savoir : Bien éloigné du taylorisme du 19e siècle qui organisait le travail (industriel notamment) de façon scientifique, le toyotisme suit un modèle où la demande guide la production. Ce modèle de travail a été élaboré dès 1962 au Japon dans les usines Toyota.
L’émergence du travail collaboratif, du télétravail et du virtuel
Le système taylorien, avec son organisation scientifique du travail (OST), est de moins en moins appliqué dans les entreprises même s’il existe encore. Il laisse peu à peu la place à une nouvelle organisation qui mise plutôt sur les compétences des collaborateurs, et sur une plus grande autonomie. Les nouvelles technologies ont permis ces changements, avec une plus grande place accordée au télétravail, aux environnements de travail mobiles et au travail virtuel. Cette flexibilité doit permettre une meilleure productivité, et une plus grande attractivité pour les salariés. En pratique, les NFOT (ou NWoW, New Ways of Working en anglais) ont pour but d’offrir une meilleure qualité de vie au travail (QVT) : moins de temps passé dans les transports en commun, moins de stress, plus d’autonomie, etc.
COVID-19 et nouvelles organisations de travail : l’impact de la crise sanitaire
La pandémie a eu un impact direct sur l’organisation de travail des entreprises. Elle les a contraintes à s’adapter très rapidement au travail à distance, afin de maintenir entièrement ou partiellement leur activité dans un contexte de crise sanitaire, pour la sécurité de tous. Un changement rapide, où télétravail, autonomie et management à distance sont devenus la norme en quelques mois voire semaines, pour des entreprises et des collaborateurs qui n’étaient pas forcément prêts. Si bien que cette évolution à marche forcée a été vécue dans la douleur pour certains, avec des conséquences humaines qui ne peuvent pas toujours être quantifiées et évaluées. Anxiété, pertes de repères et de confiance en font partie, avec des risques psychosociaux (RPS) importants. Ainsi, l’enquête CoviPrev, menée par Santé publique France depuis mars 2020, montre notamment les répercussions de la crise sanitaire COVID-19 sur la santé mentale des Français. Elle évoque ainsi ses conséquences sur leur quotidien : état dépressif ou anxieux, difficultés de sommeil… voire pensées suicidaires dans les cas les plus graves.
Comment protéger les collaborateurs dans le cadre des nouvelles organisations de travail ?
Les risques pour les collaborateurs
Dans l’ouvrage Dix questions sur le capitalisme aujourd’hui (sous la direction de Renaud Chartroire –Editions Sciences humaines, 2014), Patricia Vendramin évoque « les bouleversements du travail ». « Le management propose une vision libératrice du travail – un travail plus riche de savoir-faire et de « savoir-être », plus autonome, en équipe, plus créatif, plus responsable – mais l’individu s’y retrouve souvent piégé. L’autonomie et la responsabilisation se révèlent source d’intensification du travail et d’auto-exploitation. »
Plusieurs facteurs de risque peuvent être identifiés pour les travailleurs, dans le cadre de la mise en œuvre de nouvelles formes d’organisation du travail :
- une altération de la santé avec un poste de travail non adapté à l’activité du salarié ;
- une source de stress lorsque les travailleurs ne sont pas équipés du matériel nécessaire ;
- un environnement de travail, à domicile ou en coworking, qui ne permet pas une concentration suffisante : mauvaise adaptation du lieu, manque de calme, présence des enfants ou de proches…
- une difficulté à gérer la limite entre l’espace privé et l’espace professionnel, entre le temps de travail ou le temps de vie privée ;
- le risque d’isolement, ou le mal-être en raison d’un isolement mal supporté par un salarié ;
- des difficultés pour gérer les conflits à distance, ou une perception erronée des relations lorsque les échanges en vis-à-vis ou en groupe sont limités ;
- un manque de communication au quotidien, même dans le cadre d’un projet de travail collaboratif, d’un travail à distance ou virtuel.
Les nouvelles formes de travail entraînent des conséquences lorsqu’elles sont appliquées sans que l’entreprise et les professionnels soient formés au préalable, et accompagnés au maximum. Une augmentation de l’anxiété, une diminution de la qualité de vie au travail, un risque plus important de burn-out, de sensation d’exclusion ou d’isolement social, avec une dégradation de l’état de santé des salariés… La mise en place de solutions et de ressources en prévention de ces risques est essentielle !
Quelles actions pour limiter les risques liés aux nouvelles organisations de travail ?
L’employeur peut mettre en œuvre plusieurs mesures pour une meilleure gestion du risque ou face aux risques liés aux changements d’organisation :
- la prévention auprès des managers et de l’ensemble des salariés, avec la mise en œuvre d’un diagnostic des facteurs de risques, l’application de recommandations sur le télétravail et un accompagnement pour mieux anticiper le changement ;
- la protection des salariés, pour détecter et éviter les risques liés à un management toxique ;
- le soutien des collaborateurs, pour aller au-devant d’un salarié qui exprime une difficulté, qu’elle soit d’ordre personnel ou professionnel.
Un changement d’organisation du travail ne se limite pas, pour l’employeur, à la mise en place d’une plateforme d’échange pour les collaborateurs. La conduite du changement ne passe pas non plus par la simple exigence. Au contraire, c’est un projet qui doit suivre des actions de prévention, de protection et de formation, et elle nécessite un véritable accompagnement.